Il Blog di Enzo Bianchi

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​Fondatore della comunità di Bose

Guillaume de Saint-Thierry: «Respire le Saint-Esprit»

03/10/2011 01:00

ENZO BIANCHI

Riviste 2011,

Guillaume de Saint-Thierry: «Respire le Saint-Esprit»

Panorama

Panorama, 03 octobre 2011

 

di Enzo Bianchi

 

En tant que fils, le chrétien est appelé à participer à la vie même de Dieu, lequel, de son regard, stimule celui qui le contemple ; il donne élan et mouvement, et la beauté du souverain Bien attire celui qui le désire.

Cher Jean,

Au fond qu’est-ce que la vie spirituelle, dont je te parle si souvent sans vraiment la définir ? C’est toi qui me poses cette question dans ta lettre que je viens de recevoir : je veux maintenant tenter de te répondre en évoquant l’enseignement d’un maître spirituel d’il y a près de neuf siècles : Guillaume de Saint-Thierry.

Guillaume était abbé du monastère bénédictin de Saint-Thierry (Reims) au début du XIIe siècle. S’étant lié d’amitié avec Bernard de Clairvaux, il abandonna sa charge abbatiale et, âgé d’une cinquantaine d’années, prit l’habit cistercien. Dans son nouveau monastère des Ardennes il rédigea divers écrits, et notamment une lettre adressée aux moines de la chartreuse du Mont-Dieu, qui connut une grande fortune sous le titre de Lettre d’or. Guillaume y affirme que la vie spirituelle promet à ceux qui s’y lancent « le goût, l’intelligence, la connaissance, la jouissance »… S’il s’agit d’une « tâche ardue », elle bénéficie toujours du soutien de Dieu lui-même, lequel « accorde la grâce qui fait vouloir et la force pour réussir ; c’est lui qui prendra cette cause en main », assure l’ancien abbé de Saint-Thierry.

Le fondement de la vie spirituelle est avant tout l’exigence de sens qui habite la personne humaine. Pour trouver ce sens, on doit donc chercher, vivre, expérimenter en profondeur : voilà pourquoi la vie spirituelle peut aussi être appelée vie intérieure. Elle appelle la personne à entrevoir ce qu’il y a de plus profond en elle, ses motivations ultimes, son fondement vital, ses idéaux. Elle prend pour devise, même sous la plume de Guillaume de Saint-Thierry, l’adage qui était déjà celui de la philosophie ancienne : « Homme, connais-toi toi-même ! »

Cette vie intérieure ou spirituelle appartient donc à tout homme, et chacun peut choisir de la développer ou de la laisser en friche. Toutefois, la vie spirituelle chrétienne va plus loin : elle n’est pas le fait de tous, mais seulement de ceux qui « se laissent guider par l’Esprit de Dieu » (voir Ga 5,18). La vie spirituelle chrétienne ne peut être en effet qu’une réponse de foi, d’espérance, de charité au Dieu qui nous appelle et se rend efficacement présent dans notre existence. Elle naît de la parole adressée par Dieu au chrétien dans le baptême : « Tu es mon fils ! », fils dans le Fils Jésus Christ, et donc fils bien-aimé.

 

En tant que fils, le chrétien est alors appelé à participer à la vie même de Dieu ; plus encore, il est habilité à « respirer le Saint-Esprit », selon la belle expression que Guillaume de Saint-Thierry emprunte aux pères de l’Église orientale. La vie spirituelle chrétienne est ainsi une vie intérieure – et extérieure ! – animée et modelée par l’Esprit saint. Bien des expressions de l’apôtre Paul la décrivent : c’est une « vie cachée avec le Christ en Dieu » (Col 3,3), une « vie nouvelle » (Rm 6,4) qui offre à « l’homme intérieur de se renouveler de jour en jour » (2Co 4,16)…

Ici cependant, je te demande de prêter attention pour ne pas tomber dans l’équivoque : il ne peut s’agir d’une vie qui prétendrait être « spirituelle » uniquement à travers l’expérience liturgique ou intellectuelle ! Non, c’est tout d’abord une expérience pratique. Guillaume de Saint-Thierry le souligne lorsqu’il distingue dans la vie spirituelle trois étapes, dont la première – et incontournable – « a pour objet la vie du corps » ; c’est ensuite seulement que l’on peut s’occuper de l’esprit pour, dans un dernier temps, « trouver son repos en Dieu seul ». La vie spirituelle est donc une connaissance donnée avant tout à travers une conformation réelle de sa propre vie à la vie humaine de Jésus Christ.

En suivant cette pédagogie rudimentaire, tu éviteras de te hasarder sur des sentiers qui ne te mèneraient à rien, mais tu pourras faire cette expérience : « Dieu, de son regard, stimule celui qui le contemple ; il donne élan et mouvement, et la beauté du souverain Bien attire celui qui le désire. »

Ton ami Enzo