Panorama, 03 septembre 2012
di Enzo Bianchi
Si personne n’a jamais pu voir Dieu, Jésus permet de le pressentir dans sa personne. Connaissant davantage Jésus, on parvient à rencontrer Dieu.
On me demande parfois de décrire un chemin vers la foi pour ceux qui ne se confessent pas chrétiens. Pour répondre à cette question il n’existe certes pas de réponse facile, et moins encore de recette : on peut tenter de l’affronter à partir de sa propre expérience ou de celle de personnes qu’on a côtoyées.
Il s’agit tout d’abord d’être clairs : croire ne signifie pas « savoir », car la foi est une adhésion et non une connaissance. De plus, la foi est un don de Dieu et elle constitue un acte personnel de liberté pour l’homme.
Dans l’époque de la chrétienté, l’itinéraire de foi était un chemin classique : on « naissait » chrétien et on grandissait dans cette foi. L’Église nourrissait le fidèle jusqu’à la maturité, jusqu’au moment où la personne faisait sienne la foi héritée des génération précédentes. C’est alors seulement qu’on accédait à l’adhésion à Dieu et à Jésus Christ. Aujourd’hui, il n’en va plus ainsi : il manque une transmission « automatique » de la foi, donnée par le milieu ambiant.
L’Église elle-même n’est plus vue par ceux qui se disent en recherche comme une route vers la foi. Il y a une trentaine d’années déjà le cardinal Ratzinger écrivait : « L’Église est devenue pour beaucoup l’obstacle principal à la foi » ! Ainsi, l’itinéraire semble s’être inversé : on ne va plus de la vie de l’Église à Dieu et au Christ, mais de Jésus Christ à Dieu et à l’Église. Ainsi, pour ouvrir les personnes à la foi, il s’agit en premier lieu de leur faire connaître et rencontrer Jésus puis, à travers lui, leur faire connaître et embrasser son corps, l’Église. Dieu lui-même ne semble plus essentiel dans ce cheminement ; on peut être homme sans croire en Dieu et la rencontre avec lui ne va plus de soi. La rencontre avec le Christ, en revanche, apparaît comme une féconde possibilité d’ouverture à la foi.
Lorsqu’on découvre Jésus, sa personne intrigue, interroge, fascine, provoque une sympathie. On impute aujourd’hui bien des fautes à l’Église et à Dieu, mais on attribue difficilement à Jésus la cause des maux. Au plan humain on le considère au contraire comme fiable, digne de foi : il a en effet montré par ses paroles et ses actions qu’il a su vivre en homme authentique. Or son humanité a « fait le récit » de Dieu : ceux qui le voient découvrent en lui les traces de Dieu. Si personne n’a jamais pu voir Dieu, Jésus permet de le pressentir dans sa personne. Dès lors, connaissant davantage Jésus, on parvient à rencontrer Dieu et on peut aller jusqu’à l’aimer et à croire en lui…
A ce stade, comme on n’est jamais seul à croire, on découvre l’Église, la communauté de ceux qui croient dans le Dieu de Jésus Christ, et on sait que la foi nous en rend mystérieusement membre. Mais le chemin ne s’arrête pas là : à travers la foi, toujours parcourue de doutes, on continue à chercher, dans l’espérance de voir finalement un jour le Seigneur face à face, au-delà de la mort.