Il Blog di Enzo Bianchi

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​Fondatore della comunità di Bose

Saint Augustin: «L’espérance nous rend chrétiens»

02/12/2010 23:00

ENZO BIANCHI

Riviste 2010,

Saint Augustin: «L’espérance nous rend chrétiens»

Panorama

Panorama, 03 décembre 2010

 

di Enzo Bianchi

 

C’est uniquement l’espérance qui nous rend proprement chrétiens. L'espérance colore d’un sens nouveau toutes les réalités que nous vivons dans notre quotidien, ainsi que chacune de nos relations.

Cher Jean,

Nous voilà arrivés au temps de l’Avent : ce temps dans l’année liturgique qui ravive notre espérance de la venue du Seigneur. C’est le temps du désir et de l’invocation : « Viens, Seigneur Jésus ! ». Je voudrais alors t’inviter à entrer dans ce temps liturgique en te mettant à l’écoute avec moi d’un grand maître du désir de Dieu : saint Augustin.

Augustin est né à Thagaste (dans l’Algérie actuelle) en 354. Après une jeunesse qu’il dit avoir été dissolue, il se convertit au christianisme sous l’influence de l’évêque Ambroise de Milan, de qui il reçoit le baptême en 387. Dès ce moment, Augustin quitte son occupation de professeur de rhétorique pour embrasser la vie monastique. En 395, il est acclamé évêque de sa ville d’Hippone, ministère qu’il exercera jusqu’à sa mort en 430. Saint Augustin est sans conteste le père de l’Église dont la pensée a eu l’influence la plus considérable parmi les chrétiens d’Occident. De cet enseignement extrêmement vaste, je me limite à te présenter aujourd’hui une petite facette : celle de l’espérance qui soutient la vie chrétienne.

Au début de ses Confessions, son « autobiographie spirituelle », Augustin déclare au Christ son désir de tout abandonner en lui : « Mon cœur demeure dans l’attente tant qu’il ne repose en toi. » En effet, le chrétien trouve en Christ seul son espérance. Oui, le Christ est le sens ultime qui illumine toutes nos réalités et nos relations. Attendre et espérer son retour, c’est ainsi donner une orientation à toute notre existence et à celle de notre monde. L’espérance chrétienne est dès lors un puissant réservoir d’énergies spirituelles, elle est un élément dynamisant qui se fonde sur la foi en la mort et la résurrection du Christ.

 

La victoire du Christ sur la mort devient pour le croyant l’espérance que le mal et la mort, sous toutes leurs formes, n’ont pas le dernier mot. Saint Augustin l’exprime ainsi : « Par l’exemple de sa passion, le Christ nous a enseigné la persévérance par laquelle nous devons cheminer en lui ; et par l’exemple de sa résurrection, il nous a donné la preuve de ce que nous devons patiemment espérer en lui. Si, en effet, nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons avec persévérance. »

Dans un autre beau texte, saint Augustin va jusqu’à écrire que « c’est uniquement l’espérance qui nous rend proprement chrétiens ». C’est-à-dire que le chrétien n’a pas à chercher des choses et des réalités plus sublimes ou plus spirituelles ; mais – par son espérance – il colore d’un sens nouveau toutes les réalités qu’il vit dans son quotidien, ainsi que chacune de ses relations. Le problème n’est donc pas tant de définir l’espérance que de la vivre !

L’espérance doit alors porter une autre marque, celle de la joie, selon le commandement biblique : « Soyez joyeux dans l’espérance » (Rm 12,12). En effet, si l’horizon de la mort qui nous attend peut nous attrister, il est toutefois éclairé par la lumière de l’espérance de la vie éternelle que le Christ a déjà inaugurée. Fondée sur la Pâques du Seigneur, l’espérance met la joie au cœur du croyant, cette « joie qui s’éprouve – selon saint Augustin – dans la tranquille certitude de l’espérance ».

Si enfin tu me demande où reconnaître aujourd’hui, dans l’Église, d’authentiques témoignages de l’espérance chrétienne, c’est paradoxalement vers les situations de martyre et de persécution que je vais t’inviter à porter ton regard. Là, l’espérance de la vie éternelle, de la vie en Christ au-delà de la mort, trouve un de ses récits mystérieux, inquiétant, mais à la fois très concret et convainquant. Pense à la situation tragique des sept moines trappistes que retrace le beau film de Xavier Beauvois, Des hommes et des dieux, que tu as sans doute vu cet automne au cinéma : ces martyrs tués dans la région même où saint Augustin avait vécu seize siècles avant eux. Là apparaît crédible ce qu’Augustin a écrit: « Maintenant notre vie est espérance, puis elle sera éternité. »

Ton ami Enzo